Communautarisme

Communautarisme :
n.m., de communauté 1. Mode d'auto-organisation d'un groupe social, fondé sur une «parenté ethnique» plus ou moins fictive (mais objet de croyance), dans une perspective ethnocentrique plus ou moins idéologisée, sur le modèle «nous versus les autres» («nous» : les meilleurs des humains, les plus humains d'entre les humains). «Communautarisme» devient synonyme de «tribalisme». 2. Vision essentialiste des groupes humains, chacun étant doté d'une identité essentielle dont on suppose qu'elle est partagée par tous ses membres ou représentants. L'individu est réduit à n'être qu'un représentant plus ou moins typique de ce qu'on imagine être le groupe dans sa nature abstraite ou son essence. L'imaginaire «communautariste» partage cette vision essentialiste avec la pensée raciste ou l'idéologie nationaliste. 3. Politique en faveur des identités de groupe, culturelles ou ethniques, fondée sur la reconnaissance de la valeur intrinsèque et du caractère irréductiblement multiple de ces identités au sein d'une même société, toutes étant supposées également dignes de respect, donc jugées libres de s'affirmer dans l'espace social (mais non pas, à strictement parler, dans l'espace public, qui suppose l'existence d'un champ d'interactions transcendant les «communautés»). Telle est la vision angélique du «multiculturalisme», celle qu'en donnent ses partisans déclarés. 4. Mais le «communautarisme» peut aussi désigner l'usage politique d'un mythe identitaire fondé sur l'absolutisation d'une identité collective. Ou encore caractériser une politique fondée sur le «droit à la différence» suivi dans toutes ses implications et radicalisé en obligation, pour chaque individu, de maintenir avant tout «sa différence», c'est-à-dire l'appartenance de groupe qu'il privilégie (disons, une «culture» d'origine, religieuse le plus souvent, naturalisée). En ce sens, le «communautarisme» apparaît comme une forme de néo-racisme cuturel et différentialiste. (Source : Pierre-André Taguieff) NB : le mot ne figure pas dans le dictionnaire

http://www.communautarisme.net/index.php3?action=glossaire


Les dangers du communautarisme


Définition

Le communautarisme est un mouvement de pensée qui fait de la communauté (ethnique, religieuse, culturelle, sociale, politique, mystique, sportive…) une valeur aussi importante, sinon plus que les valeurs universelles de liberté, d'égalité, souvent en réaction au libéralisme et à l'individualisme.

Pour ses défenseurs, aucune perspective n'existe en dehors de la communauté et il est impossible de se détacher de son histoire et de sa culture. La communauté précède alors l'individu et rend la recherche de l'idéal partagé plus importante que la défense de la liberté individuelle. Pour eux, l'Etat - ou l'autorité, pour les communautés plus petites -, ne peut être neutre ou laïc en matière de choix culturels, religieux ou de morale. Les valeurs qui servent de référence sont essentiellement traditionnelles, construites sur un passé mythique ou idéalisé.

Dans les formes les plus aigues du communautarisme, le monde est manichéen. Il y a les bons (ceux qui font partie de la communauté) et les méchants (les autres).


La coopération entre groupes

Il y a quelques centaines de milliers d'années, c'est-à-dire presque rien à l'échelle d'une espèce animale, l'homme vivait, comme les grands singes en petits groupes. Il lui en est sans doute resté une prédisposition à se replier au sein de communautés (famille, groupe, tribu, cité, nation, religion). C'est une tendance forte qui tend au morcellement, au cloisonnement, à la confrontation.

La coopération entre groupes ou communautés, pour construire quelque chose de plus large, pour bâtir un projet commun, nécessite des conditions difficiles à réunir:

* Une confiance réciproque.
* Aucune des deux communautés ne doit se sentir dominée par l'autre.
* Savoir se projeter dans l'avenir pour imaginer les fruits positifs de la coopération.

Les échanges économiques et culturels peuvent favoriser ce genre de coopération. C'est souvent un début. Cependant on doit constater, en regardant l'histoire que les grands ensembles construits à l'échelle du monde ou d'un continent (les empires ou les grandes religions) ne l'ont été que par la contrainte. Les grandes "unions" imposées (ex: URSS, Yougoslavie) volent en éclat dès que la contrainte disparaît.

La construction lente et laborieuse de l'Union Européenne est sans doute l'unique exemple de réalisation concertée et voulue d'une grande communauté, à l'échelle d'un continent. L'humanité, ou tout au moins une partie d'entre elle, aurait-elle franchi le cap de sa turbulente adolescence? Il aura fallu deux guerres mondiales à une génération d'intervalle.


La cohésion de la communauté

Ce qui est important dans un groupe, c'est sa cohésion. L'unité fait sa force. Une défection peut mettre en péril l'ensemble du groupe. Plus le groupe est petit plus le risque est élevé.

Un carton rouge, un joueur de football expulsé, peut faire basculer un match. Un soldat qui déserte peut en entraîner d'autres et faire perdre une bataille. Les groupes ou communautés constitués et hiérarchisés se prémunissent contre les désertions par l'extrême sévérité des peines encourues.

Les lynchages, les exécutions, les excommunications… sont en général publiques dans le but d'impressionner les autres membres de la communauté et faire taire toute velléité de départ.

Pascal Boyer a parfaitement analysé ce phénomène dans son livre "Et l'homme créa les dieux". (Voir citations ci-contre)

Le terrorisme est donc autant une agression contre le reste du monde qu’un message d’intimidation adressé aux membres de la communauté.


" Du point de vue d'une coalition religieuse, le fait que le monde moderne permette des choix [de vie] nombreux, sans en faire payer le prix signifie que la défection ne coûte rien et qu'elle est donc très probable."

"La violence fondamentaliste est, elle aussi, une tentative de faire monter les enjeux, c'est-à-dire de décourager les désertions potentielles en démontrant que la défection leur coûtera très cher, que ceux qui adoptent des normes différentes seront persécutés ou même tués."

"Pour résumer, donc, le fondamentalisme n'est ni un excès de religion, ni de politique sous une autre forme. C'est une volonté de préserver un type particulier de hiérarchie, [...] menacée par le fait que la défection est très facile, donc très probable. [...] Le fait que le prix [de la défection] soit devenu si élevé, [à cause de la violence] indique clairement que le sentiment populaire ne penche pas de leur côté. Ce qui malheureusement, n'est pas un obstacle à la domination politique pour peu que ces coalitions aient suffisamment de cohésion."
(Pascal Boyer / Et l'homme créa les dieux)

L'islam communautariste

Actualité oblige, le premier exemple de communautarisme exacerbé qui vient à l’esprit est celui du repli identitaire d’une partie, minoritaire mais très agissante, des musulmans. Ce communautarisme, véritable frein à l’intégration (dans la communauté internationale ou au sein du pays d’accueil pour les émigrés) rejette l'influence occidentale (culturelle et religieuse) héritée du colonialisme. Il se caractérise par l’amalgame arabe - islam, qu’il tente d’imposer : un peuple = une religion. La religion, comme c’est souvent le cas dans les communautarismes devient le support culturel, idéologique et dogmatique des valeurs qui le constituent. Cependant, la dérive fondamentaliste à laquelle on assiste, a une origine plus politique, me semble-t-il, que spirituelle.

Pourquoi les populations des pays arabes, économiquement défavorisées même lorsqu’elles ont émigré, éprouvent-elles un malaise vis à vis de l'Occident qu'elles rejettent parfois violemment? La réponse n'est-elle pas à rechercher d’une part dans le problème non résolu des palestiniens avec Israël (autre forme de communautarisme) et dans l'attitude hautaine, arrogante, xénophobe pour ne pas dire raciste, des anciennes grandes puissances colonisatrices et surtout des Etats-Unis?
N’est-ce pas là le cœur du problème ?
Tant que l'Occident ne changera pas son propre comportement, il est certain que les mêmes causes produiront les mêmes effets. Si l'Occident continue de se protéger en verrouillant la cocotte-minute, sans éteindre le feu qu'elle entretient par en dessous, cela finira par exploser.


Trouver l’équilibre

Comme partout dans le monde et depuis l'origine des temps, la religion est un prétexte, un moyen de pression qui culpabilise l'individu, pour préserver la cohésion culturelle et communautaire, et assurer sa sauvegarde. Comme le communautarisme qu’elle entretient souvent, la religion rassure ses membres, tout en les étouffant.

A l’opposé du communautarisme, l'universalité, c'est-à-dire ce qui est universel, représente des valeurs qui, même si elles paraissent évidentes, ne peuvent être que postulées comme, par exemple, la liberté, l'égalité, la solidarité, la paix, le bien, la morale, la raison, le bon sens... Elles mettent l'accent sur ce qu’il y a de commun à tous les hommes et sur l'unité du genre humain, tout en respectant ses diversités. Les valeurs universelles proposent donc à l’homme un idéal, que l’on pourrait qualifier d’absolu. Mais cet idéal est souvent tellement éloigné de ce que vivent au quotidien les individus qu’il apparaît souvent trop utopique, abstrait – et surtout dangereux pour les pouvoirs non démocratiques en place.

L’individu, dans sa solitude et sa petitesse, ne peut pas ne pas faire partie d’un groupe, d’une tribu, d’une communauté… En fait, il appartient toujours à diverses communautés, en général sans rapport les unes avec les autres. Ainsi, monsieur Dupont peut être à la fois membre de la branche béarnaise de la famille Dupont-Durant, supporter du club de football de Nens-Saint Germain, militant au syndicat Nord-Ouest de son entreprise, détenteur d’une carte du parti des Ouvriers Réunis, membre de l’Eglise de la Déesse Vain Té Un, français… Il est naturel et normal qu’il en soit ainsi.

L’homme, en tant qu’espèce animale évoluée, ne pourra se développer que si toutes les communautés se respectent entre elles et respectent les fondamentaux universels de l’humanité.

Citations sur le communautarisme
Sur internet : L'observatoire du communautarisme

http://atheisme.free.fr/Religion/Communautarisme.htm

 

Vous avez dit «communautarisme» ?

par Taguieff Pierre-André *
[17 juillet 2003]

Le terme «communautarisme» est utilisé, surtout en langue française (depuis les années 1980), pour désigner avec une intention critique toute forme d'ethnocentrisme ou de sociocentrisme, toute autocentration de groupe, impliquant une autovalorisation et une tendance à la fermeture sur soi, dans un contexte culturel dit «postmoderne» où l'«ouverture», et plus particulièrement l'«ouverture à l'autre», est fortement valorisée – ce qui redéfinit l'orientation «cosmopolite». Par ailleurs, le «communautarisme» est défini par ses critiques comme un projet sociopolitique visant à soumettre les membres d'un groupe défini aux normes supposées propres à ce groupe (telle «communauté»), bref à contrôler les opinions et les comportements de tous ceux qui appartiennent en principe à ladite «communauté». La tyrannie de telle ou telle «communauté» est un phénomène social observable. Rappel à l'ordre communautaire : l'injonction «tu dois penser et vivre à l'image de ta communauté» est souvent lancée à des individus supposés prendre «trop de libertés» avec ce qu'il est communautairement convenu de faire et penser. Autre traduction possible, en éthique de l'authenticité : «Sois ce que tu es», le sous-entendu étant que mon «être» m'est donné par l'ensemble de mes appartenances. «Communautarisme» s'oppose donc à la fois à «individua lisme» et à «cosmopolitisme». Mais le terme «communautarisme» désigne aussi une idéologie dont la fonction est de légitimer la reconstruction de groupements d'individus selon leurs origines, précisément des «communautés», dans le cadre des États-nations modernes fondés sur le principe normatif de l'homogénéité culturelle et ethnique, donc dans un espace politique postcommunautaire. En ce sens, «communautarisme» s'oppose à «nationalisme» ou à «nationisme». La «communautarisation» constitue une contestation interne de la construction nationale.

Il s'agit donc d'un terme d'usage polémique, nettement péjoratif : nul ne s'affirme naïvement et fièrement «communautariste» (pas plus que «raciste»), et les «dérives communautaristes» dénoncées sont toujours celles d'un groupe autre que le groupe d'appartenance du dénonciateur. Le «communautariste», c'est l'autre. Coupable de «repli identitaire» – cliché emprunté au discours antile péniste des années 1980, avec d'autres («ferme ture», «crispation», «rigidité», «archaïsme»). L'accusation de «communautarisme» est disqualifiante dans le champ des croyances et des valeurs dites «postmatérialistes» («individualistes» ou «libérales-libertaires») : tolérance, ouverture, liberté d'expression, flexibilité, métissage, etc. Cette force de péjoration véhiculée par le mot «communautarisme» contraste avec la célébration contemporaine, dans tous les milieux politiques, des «communautés», des «cultures» ou des «identités», bref de groupes qu'on suppose porteurs de valeurs incomparables et inestimables, faisant partie du «patrimoine culturel de l'humanité». Face aux cultures, aux spécificités ou aux identités communautaires, on appelle à pratiquer la «tolé rance», on incite à ne pas «stigmatiser», voire à «respecter».

Blâme du «communautarisme», éloge des «communautés» : ce singulier contraste est à l'image des paradoxes qu'on rencontre dès lors qu'on tente de voir plus clair dans le tunnel des idées reçues sur la question. Si le mot «communauté» est défini dans tous les dictionnaires de langue (autour d'un noyau dur : une collectivité sociale dotée d'une unité et d'une identité), le mot «communautarisme» ne fait toujours pas l'objet d'un article dans la nouvelle édition (2002) du Petit Robert. Indice de prudence ou symptôme d'un malaise ? Ce mot en «isme» est pourtant d'usage courant depuis deux décennies.

La dénonciation du «communautarisme» pourrait être abandonnée dans le stock des postures politiciennes disponibles, en tant que dénonciation convenue et convenable, n'engageant à rien, fondée sur une notion confuse. On peut néanmoins, en ordonnant les connotations du terme, distinguer quatre définitions possibles, qu'il s'agit de construire, de la notion floue de «communautarisme».

1. Mode d'auto-organisation d'un groupe social, fondé sur une «parenté ethnique» plus ou moins fictive (mais objet de croyance), dans une perspective ethnocentrique plus ou moins idéologisée, sur le modèle «nous versus les autres» («nous» : les meilleurs des humains, les plus humains d'entre les humains). «Communautarisme» devient synonyme de «tribalisme».

2. Vision essentialiste des groupes humains, chacun étant doté d'une identité essentielle dont on suppose qu'elle est partagée par tous ses membres ou représentants. L'individu est réduit à n'être qu'un représentant plus ou moins typique de ce qu'on imagine être le groupe dans sa nature abstraite ou son essence. L'imaginaire «communautariste» partage cette vision essentialiste avec la pensée raciste ou l'idéologie nationaliste.

3. Politique en faveur des identités de groupe, culturelles ou ethniques, fondée sur la reconnaissance de la valeur intrinsèque et du caractère irréductiblement multiple de ces identités au sein d'une même société, toutes étant supposées également dignes de respect, donc jugées libres de s'affirmer dans l'espace social (mais non pas, à strictement parler, dans l'espace public, qui suppose l'existence d'un champ d'interactions transcendant les «communautés»). Telle est la vision angélique du «multiculturalisme», celle qu'en donnent ses partisans déclarés.

4. Mais le «communautarisme» peut aussi désigner l'usage politique d'un mythe identitaire fondé sur l'absolutisation d'une identité collective. Ou encore caractériser une politique fondée sur le «droit à la différence» suivi dans toutes ses implications et radicalisé en obligation, pour chaque individu, de maintenir avant tout «sa différence», c'est-à-dire l'appartenance de groupe qu'il privilégie (disons, une «culture» d'origine, religieuse le plus souvent, naturalisée). En ce sens, le «communautarisme» apparaît comme une forme de néo-racisme cuturel et différentialiste.

Pour la théorie normative de la démocratie, le terme de «communautarisme», si l'on neutralise sa forte charge polémique, apparaît comme un synonyme bancal de «multicommunautarisme», désignant les doctrines politiques de la société multiculturelle ou pluriethnique («ethnopluralisme»), et impliquant une conception de la société désirable comme un ensemble de «communautés» ou de «minorités» juxtaposées, chacune vivant selon ses valeurs et ses normes propres, au nom d'une conception de la tolérance fondée sur le relativisme culturel radical. Mais la tolérance exigée va au-delà de la simple non interdiction, qui revient à reléguer l'expression des identités dans la sphère privée : elle tend à se confondre avec une revendication de reconnaissance positive dans l'espace public. Tolérer ne signifie pas ici supporter ce qui est jugé difficilement supportable, mais respecter inconditionnellement les manières d'être et de penser d'un groupe, en évitant de dévaloriser son autoreprésentation et d'affecter l'estime de soi de ses membres. C'est pourquoi le recours au langage «politiquement correct» dérive nécessairement de la politique de la reconnaissance : l'impératif non discutable est qu'il faut éviter de porter atteinte à l'image ou à la dignité de tout groupe social «minoritaire». Dans cette perspective, le modèle de l'assimilation est récusé en ce qu'il ferait violence aux spécificités ou aux particularismes jugés intrinsèquement et également respectables.

L'espace social postnational est ainsi ethnicisé, voire racialisé, et ce, le plus souvent, au nom de l'antiracisme.

Le multicommunautarisme est une contrefaçon du pluralisme politique : il fige les identités collectives (toutes plus ou moins fictives, inventées ou réinventées) et instaure – au nom de la «tolérance» – un espace pluriconflictuel occupé par les actions concurrentielles des entrepreneurs d'identité communautaire (pour capter les allocations étatiques, mobiliser un secteur de l'électorat, monopoliser la représentativité médiatique, etc.). La politique, dans une société multicommunautariste, se réduit à un arbitrage permanent entre des groupes de pression dont les intérêts sont rivaux, incompatibles ou mutuellement exclusifs : la possibilité même d'une référence à un bien commun ou à l'intérêt général disparaît. Les revendications identitaires sont sans limites, les désirs communautaristes sont insatiables.

La question du «communautarisme» se complique du fait de ses interférences avec le nouveau radicalisme de gauche et les stratégies de la guerre culturelle conduite par les fondamentalistes islamiques (les «islamistes»). Ces milieux néo-gauchistes soutiennent significativement l'offensive des militants islamistes pour ébranler le consensus républicain, à travers le port du «foulard islamique» dans les lieux scolaires. Ledit «foulard» constitue à la fois le symbole ultra-visible d'une appartenance religieuse (où s'affirme l'enfermement «communautariste») et le drapeau d'un combat politico-religieux, celui de l'islamisme radical, dont l'objectif final est l'«islamisation de la modernité». Ce projet d'islamisation planétaire comporte la visée d'une destruction du pluralisme libéral, garanti par l'existence d'États de droit et/ou de démocraties constitutionnelles.

La réponse des républicains, par définition défenseurs du principe de laïcité, est de moderniser l'islam. Il s'agit d'abord, dans la culture musulmane qui tend à les confondre, de distinguer et de séparer le politique et le religieux. Ce qui revient à favoriser l'apparition d'un «islam laïque», compatible avec les principes de la démocratie pluraliste et les valeurs de l'individualisme (privatisation de la foi). Mais si cet «islam à la française» est assurément désirable, son émergence se heurte à un obstacle sociopolitique de taille : l'affaiblissement, voire l'effritement des États-nations à l'époque de la globalisation. Pour faire émerger un islam «intégré», il faut prendre appui sur une structure politique intégratrice, dont les principes fondateurs fassent l'objet d'une adhésion forte des citoyens, et puissent faire rêver les candidats à l'intégration. La nation française, dans l'état où elle se trouve, est-elle suffisamment attractive ? La France rayonne-t-elle toujours au point de pouvoir compenser par des biens symboliques nationaux la perte d'une partie des nourritures psychiques fournies par les systèmes de croyances d'origine ?

* Philosophe, directeur de recherche au CNRS, auteur entre autres de La Nouvelle Judéophobie (Editions des Mille et une nuits), de L'Illusion populiste (Berg international) et de Du progrès (Librio).

http://www.revue-politique.com/7,article,rp200307,18,0000x0000p0009.htm


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