Pharmaciens

10 avril 2001

Le président du syndicat des pharmaciens de Seine-Saint-Denis, Bruno Lamaurt a déclaré le 4 avril à l’AFP que depuis janvier 2001, " quelques 50 braquages visant des pharmacies ont été dénombrés en Seine-Saint-Denis, soit autant que pour l’ensemble de l’année 2000 ". " Si on poursuit sur ce rythme là ", a-t-il ajouté, " la moitié des 495 pharmacies du département auront été braquées d’ici la fin de l’année ".

 

Agressée 56 fois dans sa pharmacie

«ON DEVRAIT préparer les futurs pharmaciens aux braquages dès la Fac. » Coincée entre trois cités, non loin de la gare RER, cette pharmacienne de Drancy (Seine Saint Denis) sait malheureusement de quoi elle parle. En trente-trois ans d'exercice, elle détient un triste record en Ile-de-France : 56 agressions dont 36 vols à main armée. « Avec l'expérience, on reconnaît tout de suite les braqueurs. Ils ont beau entrer dans l'officine comme n'importe quel client, ils n'ont pas la même façon de pousser la porte. On sent qu'ils ont la trouille, c'est d'ailleurs pour cette raison que je me suis fait tirer dessus », explique l'intéressée. C'était il y a vingt-cinq ans pour un motif qui reste invariablement le même. « Il voulait la caisse. Mais j'avais auprès de moi une bouteille d'ammoniaque que je lui ai présentée comme du vitriol. Je lui ai dit : Tu fais ce que tu veux mais tu resteras défiguré à jamais. Il a reculé, il était presque à la porte. J'ai bien vu qu'il avait peur mais j'étais loin de penser qu'il tirerait. » Blessée à la thyroïde, la pharmacienne garde encore les stigmates de ce vol qui reste, à ce jour, son plus mauvais souvenir. La petite cicatrice qu'elle porte au cou est là d'ailleurs pour le lui rappeler. A l'avant-bras gauche, une autre « blessure de guerre » a fait son apparition tout récemment. « Un braquage avec un tournevis », lance sans émotion la pharmacienne. « Vol initiatique » Avec la construction des grands ensembles et le phénomène des cités, elle a vu émerger un nouveau type d'agression, le « vol initiatique ». « C'est une sorte d'examen de passage, l'un attend sagement à l'extérieur de la pharmacie en attendant que l'autre prenne la caisse ou n'importe quoi d'autre d'ailleurs. L'important c'est de prendre quelque chose, même du sparadrap. » Installée derrière son comptoir, elle reconnaît que, depuis deux ans, le comportement du client lambda a, lui aussi, beaucoup changé. « Les gens sont de plus en plus agressifs. Lorsque nous n'avons pas le médicament qu'ils demandent, ils n'hésitent plus à nous balancer l'ordonnance au visage », regrette la praticienne. Pas question pour autant de quitter sa petite officine. Ces galeries marchandes où les pharmaciens sont regroupés, elle les a tout simplement en horreur. « Ici, je suis utile, j'ai un rôle social. Lorsque les agressions arrivent, il faut savoir calmer la sauce. Faire en sorte qu'il y ait un dialogue, même si l'autre, en face, vous insulte. Un braqueur silencieux est toujours beaucoup plus dangereux. »

C.M.

 

Produits volés. Cambriolages de pharmacies : 1971 : 21 ; 75 : 795 ; 80 : 900 ; 85 : 551 ; 90 : 135 ; 91 : 131 ; 92 : 186 ; 93 : 113 ; 94 : 139 ; 95 : 102 ; 96 : 58 ; 97 : 43 (+ 10 tentatives). Vols : 1997 : avec violences contre pharmaciens et médecins 5, autres établissements 53, autres vols au préjudice de médecins 198.

 

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